Le Grand débat national s’est achevé, la restitution commence au plus haut niveau, comme hier celle du Premier ministre devant l’Assemblée nationale, aujourd’hui le Sénat ; hier à Marly Fabien Thiémé et des élus ont joué la carte de cette restitution d’un échange démocratique inédit sous la 5ème République, mais de proximité aussi !
Fabien Thiémé : « Emmanuel Macron est attendu au tournant »
L’édile de la commune a d’abord retracé la genèse locale de cet échange participatif singulier. « Il est né le 17 novembre avec le mouvement des Gilets Jaunes. Nous assistons à un ras-le-bol général », entame Fabien Thiémé.
Dans cette optique, la ville de Marly a lancé des cahiers de doléances mi-décembre, presque dans les premières villes de France. Cette initiative a vu sa ligne d’arrivée avec la remise de « 1025 doléances de la colère au Président de la République », souligne Fabien Thiémé. Ce dernier, invité comme de nombreux maires de la région des Hauts-de-France, a écouté Emmanuel Macron sur des dossiers cruciaux pour la 3ème région de France.
Le Canal Seine Nord Europe toujours d’actualité
L’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir, et de l’ancien maire du Havre, Edouard Philippe, comme premier ministre a un peu relégué le CNSE dans les dossiers suspendus. En effet, lancé sous Nicolas Sarkozy, revisité du grenier à la cave sous François Hollande, mais face aux choix budgétaires complexes fin 2017, le Canal Seine Nord Europe fut écarté des priorités compte tenu de son coût très lourd, mais aussi d’une concurrence avérée avec le Port du Havre. L’avènement du CNSE serait une catastrophe économique pour Le Havre et son environnement immédiat.
« Emmanuel Macron a confirmé le démarrage du CNSE durant le second semestre 2020 », précise Fabien Thiémé. De plus, l’Europe qui avait confirmé un engagement de financement à hauteur de 40% sous François Hollande aurait « augmenté sa participation à 50%. Cela représente 8 000 emplois sur le chantier et 16 000 après en fonctionnement », ajoute le maire. Si pour le chantier, cela ne fait guère de doute, le second chiffre est plus qu’au doigt mouillé. Surtout Edouard Philippe sera-t-il le 1er ministre qui va crucifier le Port du Havre ? A l’époque, Dominique Riquet avait confirmé s’être entretenu avec tous les acteurs économiques de ce territoire, et de leur hostilité totale à ce projet.
« Une nouvelle étude pour les dessertes du TGV », Fabien Thiémé
Autre dossier ultra sensible, l’ouverture de la concurrence et les aménagements de la SNCF conduisent à des tensions. « Emmanuel Macron a demandé à la SNCF une nouvelle étude pour la desserte par le TGV des gares de Valenciennes, Douai, Arras, Hazebrouck, et Dunkerque. C’est très important pour le service public et les usagers », poursuit Fabien Thiémé. En résumé, le Président de la République doit peser de tout son poids sur Guillaume Pépy, le patron de la SNCF dont le 1er client est l’Etat. « Rendez-vous compte, une personne avec un emploi à Paris devrait prendre le TCE (Ex TER) pour rejoindre Lille, puis prendre le TGV pour Paris », assène-t-il avec justesse, car cela deviendrait un énorme problème en terme de mobilité tout court. Néanmoins, on peut noter que peut-être jamais un Président de la République, depuis le Général de Gaulle, n’a autant rassemblé entre ses mains l’attente des Français, le pouvoir de faire. C’est le retour de boomerang de la verticalité, et en même temps on lui reproche tout, et surtout de tout concentrer entre ces mains, terriblement français ce paradoxe. On adore couper les têtes de la monarchie, mais on trouve diablement sympathique la famille royale anglaise… ! Enfin, au niveau des sujets régionaux, la redynamisation du Bassin minier demeure d’actualité, à la fois sur la réhabilitation des logements, mais également sur l’exonération fiscale pour toute entreprise venant s’installer dans le Bassin minier.
« C’est le dossier du siècle pour Marly », Fabien Thiémé
Le Président de la République a également confirmé le doublement du NPRU (Nouveau Plan de Rénovation Urbaine), improprement baptisé ANRU 2. « C’est le dossier du siècle pour Marly avec près de 100 millions d’euros, une école pour 500 élèves, un restaurant scolaire, entre 350 et 450 logements, les voiries et trottoirs, et un nouveau service public pour 10 ans dans ce poumon de Marly, la Briquette ! », commente Fabien Thiémé.
Le débat
Après cet exposé liminaire du locataire du fauteuil majoral, le débat s’est s’engagé dans la salle. En premier lieu, il est évident qu’ « Emmanuel Macron est attendu au tournant », souligne Fabien Thiémé. Jamais depuis le départ du Général de Gaulle pour une journée à Baden-Baden, le 29 mai 1968, le destin de la France, de notre corpus societal, ne s’est autant concentré sur un seul homme. L’incertitude fige les esprits dans l’espoir mesuré d’une redistribution des cartes suite à cette montée du baromètre des Français, et pas seulement des Gilets Jaunes. Ces deniers ne sont pas plus nombreux, voire beaucoup moins, que des manifestations connus antan, voire pour des lois récentes contestées sous François Hollande. Par contre, son mode opératoire est innovant, répond à une nouvelle dynamique « car il est impossible de faire grève comme avant compte tenu de la précarité, on ne peut plus perdre une semaine de salaire », précise Fabien Thiémé. Ce mouvement marquera à jamais l’histoire de la 5ème République, il est en rupture de tout !
« La fin de la taxe d’habitation pose un problème. Le président a indiqué qu’il remboursait jusqu’en 2021 jusqu’à l’euro près, après ? Aujourd’hui, il existe une inégalité criante entre les ressources des communes. Il faut plus d’équité », explique Fabien Thiémé. De l’autre coté, on s’habitue vite aux ressources confortables « et certaines mairies avec des CFE importantes ont adapté leur budget, et leur fonctionnement à ce niveau », précise Jérome Leman. Dans ce cadre, la redistribution des communes riches vers les pauvres eut été très pertinente, mais toute la difficulté est là. Une commune fera plus facilement un don à l’autre bout du monde au nom de tous les habitants que de reverser au pot de la solidarité nationale, le paritarisme communal n’existe pas du haut de son clocher et de son Hôtel de Ville, on ne fait jamais peuple avec la commune voisine. Ainsi vont 36 000 communes françaises, réduites à 34 800 avec les regroupements imposés par la loi NOTRe.
Trop d’impôt tue l’impôt
La « tolérance fiscale zéro » évoquée par le 1er ministre est une réalité. Pour autant, elle se conjugue avec un besoin plus que prégnant d’un maintien du service public. L’équation n’est pas simple pour le Président de la République. Comment réduire la pression fiscale pour la majorité d’entre les français, et en même temps maintenir un service public de qualité. En clair, on ne peut pas tout demander au budget et rien à l’impôt, nous verrons d’ici 8 jours la réponse du sommet de l’Etat.
« Les familles ne s’en sortent plus, les classes précaires, mais également les classes moyennes », précise Fabien Thiémé. Ce nivellement vers le bas ne peut plus durer, le pouvoir d’achat retrouvé ne peut que passer par une réduction des coûts, des taxes, cette exaspération très marquée chez les Français dans ce Grand débat national a relégué bien des sujets dans les limbes.
Un ministre, une réforme !
Premier budget de l’Etat, l’Education nationale est à bien des égards le plus exposé des ministères. « Avec 14 ministres en 10 ans, le Ministère de l’Education nationale symbolise la volonté de chaque ministre de refondre le système », explique une intervenante. « Chaque ministre veut faire une loi portant son nom », ajoute Jérome Leman.
Et en même temps, toutes les écoles ne sont pas accessibles. « Certaines écoles de commerce coûtent 10 000 €. Les familles, voire les jeunes, n’ont pas les moyens de faire un crédit pour faire ces études », explique Virginie Melki. D’ailleurs, si tel était le cas, ne tomberions-nous pas dans le phénomène connu aux Etats-Unis où certains éminents spécialistes annoncent qu’après la crise des Subprimes en 2008, venus de crédits immobiliers accordés tous azimuts, celle des étudiants américains surendettés serait la prochaine grande crise financière planétaire : https://etudiant.lefigaro.fr/article/les-etudiants-americains-croulent-toujours-plus-sous-la-dette_409518cc-aad8-11e8-af73-6caf6029776e/
Hausse du SMIG
Fabien Thiémé souligne l’impératif d’une hausse du SMIG de 200 euros minimum. « Attention, cette hausse est possible pour les grands groupes, mais les PME, TPE, Artisans, ne pourraient pas appliquer cette mesure », précise Virginie Melki.
La défiance des élus
Le citoyen n’a plus confiance dans le politique. C’est un fait, mais il faut toujours savoir raison gardé. « Certains ont reproché à Fabien Thiémé d’avoir serré la main au Président de la République ; il faut faire attention de ne pas remettre en cause la République. Emmanuel Macron n’est pas Salvini, Orban etc. », rappelle Jérome Leman. Pour conclure ce débat, la phrase prononcée par des grands noms comme Marx, Churchill fait toujours du bien aux oreilles : « Les peuples qui ne connaissent pas leur histoire, sont condamnés à la reproduire ».
Publié par Daniel Carlier sur le site va-infos le 10/04/2019